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L’IA, nouvelle traductrice de la Bible?

Depuis que l’intelligence artificielle ChatGPT a été lancée en novembre 2022, de plus en plus de personnes ont pris l’habitude d’y avoir recours pour rédiger leurs e-mails ou cartes de vœux. Mais celles-ci se sont aussi interrogées : « Mes compétences rédactionnelles sont-elles si facilement remplaçables ? Mon emploi pourrait-il être tout bonnement remplacé pour une intelligence artificielle… ? »

La crainte est légitime. À l’heure actuelle, de nombreux domaines professionnels savent qu’ils seront significativement impactés voir menacés par le développement de l’intelligence artificielle (IA).

Mais alors qu’en est-il de la traduction de la Bible ? Dans quelle mesure le travail des traducteurs et des traductrices va-t-il être impacté ?

Les langues minoritaires mises à l’écart

ChatGPT et autres ChatBots sont des IA avec lesquelles les utilisateurs peuvent directement converser, via un chat. Il suffit de rédiger une question ou demander l’exécution d’une tâche rédactionnelle et l’IA génère une réponse immédiate. Les IA dites génératives permettent aussi de produire rapidement des images d’illustration ou des vidéos.

Les réponses de ChatGPT sont basées sur des millions de pages de textes et de données qui lui ont été fournies (ChatGPT a été alimenté par 300 milliards de mots). Les logiciels de traduction, comme Google Translate ou DeepL fonctionnent d’ailleurs de manière similaire.

Cependant, les données numériques qui nourrissent les IA proviennent en majorité des pays occidentaux. Pour le moment, sur les 7’394 langues parlées dans le monde, seules une trentaine d’entre elles sont véritablement concernées par l’utilisation des IA. Les langues minoritaires, sans littérature importante, sont de fait exclues du processus. L’IA accentue ainsi la mise à l’écart des langues et cultures minoritaires, en favorisant la dépendance aux langues dominantes.

Menace ou opportunité ?

L’IA soulève des enjeux qui nécessitent une approche critique avant de se lancer dans une utilisation systématique et sans limites. Néanmoins, l’IA pourrait aussi être une aubaine pour l’avancée de la traduction de la Bible. En voici trois exemples, présentés durant le dernier Sommet missionnaire sur l’IA (Missional AI Summit 2023) à Orlando, USA :

L’IA peut occuper un rôle de « copilote » au sein d’une équipe de traduction. Sous forme de ChatBot, elle pourrait faire des suggestions de traduction. Par exemple, un traducteur demandera : « Qu’est-ce qu’un ephod et comment le traduire ? ». Le ChatBot qui aura été nourri de la littérature spécialisée correspondante pourra alors rapidement générer une solution. Plus le nombre de livres bibliques déjà traduits sera important, plus ses suggestions seront pertinentes. Mais attention, la communication avec le ChatBot se déroulera dans la langue véhiculaire, et non pas dans la langue locale visée.
L’IA peut aider à la vérification des textes traduits. SIL (organisation partenaire de Wycliffe Suisse) a développé un logiciel dénommé AquA, qui compare des textes dans deux langues différentes, par exemple l’anglais et une langue locale. AquA met en évidence quatre types de différences : le nombre de mots, le sens, le degré de littéralité et de lisibilité du texte.

L’IA peut devenir la traductrice ! Si le Nouveau Testament est déjà disponible dans une langue locale, l’IA peut à partir de celui-ci traduire une grande partie de l’Ancien Testament. Des tests ont été menés dans une langue d’Asie du Sud et les résultats ont été très encourageants. Globalement les phrases étaient naturelles et grammaticalement correctes. La précision et la finesse des textes n’étaient cependant pas satisfaisant, nécessitant l’intervention d’un traducteur. Ainsi, le temps d’élaboration du « premier jet » de traduction a pu être réduit de manière notable, mais tout le travail de conception et de vérification a dû être réalisé par l’équipe de traduction. C’est là le cœur du projet, et là où de véritables traducteurs ne peuvent être remplacés.

Aujourd’hui, l’intelligence artificielle peut donc devenir une véritable partenaire dans les processus de traduction biblique. Mais celle-ci doit garder la place qui lui revient ; celle de copilote. ChatGPT le reconnaît aussi : « Traduire la Bible dans une langue minoritaire est une tâche complexe qui nécessite une expertise linguistique approfondie, une compréhension culturelle et religieuse, ainsi que la validation de spécialistes dans la langue cible ». L’expertise humaine n’est donc pas prête d’être remplacée pour traduire la Parole de Dieu.

Tu travailles dans le domaine informatique et tu t’intéresses à l’IA ? Notre organisation partenaire SIL a toujours été à l’avant-garde des nouvelles technologies. Nous avons besoin de passionnés d’informatique dans nos équipes ! Si c’est ton cas, n’hésite pas à prendre contact avec nous !